Comment ne pas applaudir à ceci : « Modèle américain ou modèle chinois, je ne veux pas vivre dans ce choix. » ( Zizek). Et à ceci : « Il faut réinventer des modalités de mobilisation populaire.[...] Je n’aime pas la violence physique, j’en ai peur, mais je ne suis pas prêt à renoncer à cette tradition de la violence populaire. Cela ne veut pas toujours dire violence sur les personnes. » (Zizek encore.) Bien entendu, dans la phrase précédente, c’est l’adverbe « toujours » qui fera sauter en l’air nos humanistes démocrates : « Ah, vous voyez bien, il n’exclut pas la violence sur les personnes ! » Et vous, vous l’excluez, cette violence-là cent, mille fois plus fréquente et féroce que le marché, le capitalisme, sa loi d’airain et ses gardes prétoriennes, par les violations quotidiennes des droits de l’homme par eux engendrées (toutes les semaines, on se pend en prison, on se jette par la fenêtre pour échapper aux expulsions, on crève de froid et de faim sous les néons des boutiques de luxe, on se saoule et se drogue pour tenter d’oublier qu’on n’a aucun avenir, on se fait pute pour payer son loyer ou nourrir son môme...), que cette société de merde, dirigée par des crapules et/ou des incapables, impose au peuple prétendument souverain, dites, vous l’excluez ? Ah, il est plus facile d’aller faire de la retape au dîner du Crif et d’inventer, au nom du « devoir de mémoire », je ne sais quel projet d’adoption virtuelle des pauvres petites victimes juives (et merci à Simone Veil d’avoir promptement flingué cette connerie) que d’offrir une vie acceptable à des milliers de pauvres petits vivants ceux à qui on promet des « plans Marshall » (mais non financés) et qui ne voient débarquer que des bataillons de flics suivis d’escadrons de journaleux. Ah, la belle politique, la délicieuse démocratie !Le reste ici.« Le drapeau, la patrie, le civisme, la morale », dit-il. Qui ça ? Le grand copain de Balkany-les pots de vin, Doc Gyneco-la fumette, Johnny-l’Helvète, Bolloré-le voyagiste, Idriss Deby-l’humaniste, et tant d’autres que, quand on les croise, on change vite de trottoir pour respirer plus pur. Et Dieu, dans tout ça, sacré Chancel (aussi un ami du président bling-bling) ! Dieu, on s’en tape ; mais la religion, pour les faire tenir tranquille, hein (Napoléon le professait déjà, mais il avait légèrement plus de classe) ! « Opium du peuple », disait l’autre vieux barbu, qui n’habitait pas, lui, dans les nuages. Au fait, voulez-vous que je vous dise, la violence : je la redoute aussi, moi. Celle des désespérés, qui n’ont lu ni Badiou ni Zizek. « Les émeutes de banlieues en France sont nées d’un mécontentement non-articulé à une pensée, même de façon utopique. C’est ça, la tragédie. » (Zizek)
22 février 2008
Démocratie en péril
15 février 2008
Mémoire
Ce qui m'a choqué (outre l'instrumentalisation de l'histoire qui hélas se banalise) c'est que cela se limite aux enfants juifs. L'holocauste n'a pas épargné non plus les enfants Roms. Et rien sur les Arméniens, les Cambodgiens, ou les Rwandais (c'est vrai que dans ce dernier cas, le devoir de mémoire de l'état français est mis sérieusement à l'épreuve).
Mais voilà, Simone Veil en rajoute :
Interrogée par L'Express.fr, elle juge, vendredi 15 février, que cette proposition est"inimaginable, insoutenable, dramatique et surtout, injuste". "On ne peut pas infliger ça à des petits de 10 ans, on ne peut pas demander à un enfant de s'identifier à un enfant mort, souligne-t-elle, cette mémoire est beaucoup trop lourde à porter." La suggestion de M. Sarkozy risque d'attiser les antagonismes religieux, dit-elle encore : "Comment réagira une famille très catholique ou musulmane quand on demandera à leur fils ou à leur fille d'incarner le souvenir d'un petit juif ?"De famille catholique, je ne vois pas ce qui m'empêche de rendre hommage aux victimes de la Shoah... ni à celles des autres holocaustes... dire que j'oubliais Srebrenica ou la Tchétchénie... Mme Veil ferait-elle de l'incitation à l'intolérance ?
Elle persiste :
Déportée à l'âge de 16 ans, elle témoigne : "Nous mêmes, anciens déportés, avons eu beaucoup de difficultés, après la guerre, à parler de ce que nous avions vécu, même avec nos proches. Et, aujourd'hui encore, nous essayons d'épargner nos enfants et nos petits-enfants."Je viens de lire I sommersi ed i salvati, de Primo Levi. Déporté à Auschwitz, il raconte dans ce livre comment la mémoire de la déportation est difficile : entre les survivants, qui soit culpabilisent, soit mentent parce qu'ils doivent leur survie à une position en quelque sorte privilégiée et les bourreaux, qui forcément mentent...
Mais cette mémoire est nécessaire, même si elle n'a pas empêché ce qui s'est passé de se reproduire... Sa récupération par un président dont l'objectif est de détruire les acquis du Conseil national de la résistance est simplement dégoûtante, comme son utilisation au Moyen Orient pour construire et défendre un état qui s'appuie sur les mêmes idées de suprématie ethno-religieuse que celles finalement en vigueur dans le Troisième Reich.
N'oublions pas. Et agissons.
Au fait, quelqu'un a-t-il la liste des habitants de Béziers massacrés par les Français en 1209 ?
13 février 2008
Pour Sébastien
J'ai lu dans Libé Lyon un résumé de la courte vie de votre fils Julien. Je cherchais juste un nom à qui faire part de ma tristesse.
Julien a été broyé par un système infâmant, comme seules des élites égoïstes et dépourvues d'humanité en est capable. Hélas, ces élites sont confortées dans leurs agissements par un électorat qui n'ouvre les yeux que bien trop tard.
Je vous souhaite tout le courage du monde pour faire face à cette absence et continuer à avancer dans la vie. Ensemble, les hommes et femmes de ce pays, dont vous faites partie, sont , s'ils le veulent, encore capables de chasser par les urnes de tels incompétents.
6 février 2008
Françafrique quand tu nous tiens
D'ailleurs, un vrai organe d'information, Bakchich, nous raconte les mésaventures d'un fournisseur français du propriétaire du Congo-Brazzaville :
Bricolage judiciaire autour de la villa de SassouSans commentaire...
mardi 5 février 2008 par Jacques-Marie Bourget
Que pèse un petit maçon français face au dictateur congolais quand ce dernier a « omis » de lui régler quelques menues factures ? La justice tricolore semble avoir son avis.Le type qui n’a vraiment pas de chance c’est l’entrepreneur en bâtiment français qui poursuit depuis des mois Sassou Nguesso, le dictateur rouge (la couleur du sang noir) qui règne sur le Congo. Mardi 5 février, le maçon très entêté a fait, une fois de plus, convoquer le clan Nguesso devant le tribunal de grande instance de Versailles, porte 152 à 8 heures 45. Il réclame qu’on lui paye enfin une facture de travaux bel bien exécutés. Quelle sotte idée de réclamer des sous à ce sage d’Afrique, au moment où l’appui qu’il donne à Idriss Déby, dans l’embarras avec ses rebelles sur le dos, est jugé « capital » par l’équipe Sarkozy. Nguesso envoie donc des armes à son ami tchadien, et même quelques-uns de ces hommes qui vont si bien avec le bon bout du fusil, la crosse. Troubler en ce moment la bonne volonté d’un ami d’ami de la France ? Ce n’est pas bien malin. D’autant que ce Sassou (combien d’opposants morts au compteur ?), Nicolas Sarkozy le trouve « sympa ». Il n’y a que Rama Yade qui a boudé ce grand Congolais lors de sa visite à l’Elysée. On se demande pourquoi ?
Sur le sujet, celui de cet entrepreneur qui veut ses sous, le tribunal de Versailles a été bien « briefé » par la chancellerie de Rachida Dati. L’affaire est ultra « signalée ». Un membre du parquet aurait même pris contact avec l’avocat du maçon pour le dissuader « de faire du tapage. De traiter tout cela dans la discrétion qui convient… » à cette affaire d’Etat. Pas de chance, Bakchich, qui suit le rôle des tribunaux avec attention, a repéré la discrète audience. Au cours de laquelle le tribunal, hélas, va examiner des documents, titres de propriété et papiers de succession qui ne correspondent pas tout à fait à la réalité.
Sassou perd la tête depuis qu’il a vu Suzette
Donc ce bon maçon, sur ordres de la nébuleuse familiale Nguesso, a effectué des travaux dans un hôtel particulier du Vésinet, la « Villa Suzette », au 45 de la rue Maurice Berteaux. Officiellement c’est Valentin, frère du « conducator » africain, qui est le propriétaire de « Suzette ». Sassou ne faisant « qu’utiliser » la maison de son frère… Dans l’histoire de ces 485 m2, il y a aussi Wilfrid, le neveu du maître, qui met aussi son nez. Wilfrid agit par amour pour son oncle. Car le neveu n’est pas à l’étroit. Il vit à Courbevoie dans une villa un peu plus grande, 550 m2, avec garages pour Porsche, Ferrari, Aston Martin et autres crache-carbone.
Entre Chirac et Sassou, Wilfrid a joué un rôle de grand tisonnier : celui qui entretient la flamme de l’amitié. Par ailleurs, dixit le Canard Enchaîné : « Wilfrid Nguesso joue un rôle important dans le business franco-congolais : il dirige la Société Congolaise de Transports Maritimes, qui a pour partenaires le pétrolier Total ainsi que le groupe Bolloré et les autres. » Un type qui est ami de Deby et de Bolloré ne saurait être fondamentalement mauvais.
Bref, au Vésinet, une première tranche de travaux (3 400 000 euros), jugée pas assez chic, est cassée pour qu’on s’oriente vers les robinets d’or et le marbre de Carrare. On attaque donc une seconde tranche qui se monte à 800 000 euros. Sassou le vaut bien. Sur ce chantier de la gloire, l’entrepreneur, lui, attend toujours un solde de 600 000 euros, ce qui le rend grincheux. Sassou argue que cette maison n’est pas à lui. Quant à Wilfrid, il a tout oublié de « Suzette ». L’hôtel particulier, c’est bien commode, est présenté aujourd’hui comme la propriété d’une société de droit luxembourgeois aux actionnaires anonymes. Vivre heureux, c’est vivre caché.
« Sherpa » monte au créneau
Bien plus commode quand on sait que, cet été, ce bien de famille a été au cœur d’une autre bataille judiciaire. « Sherpa » , le réseau international de juristes qui n’a rien compris à la nouvelle politique sarkozienne de « rupture », a assigné Sassou devant la justice française. Avançant que les biens hexagonaux du dictateur « ont été payés avec l’argent du peuple congolais ». Incroyable. Et nos magistrats du parquet ont dit que non. Que la preuve de la chose n’était pas rapportée et qu’il n’y avait donc pas matière à poursuivre. Mais l’impérial William Bourdon, l’avocat-président de « Sherpa » et par ailleurs ami de Bakchich, continue d’enfoncer son clou dans la croix de Sassou : « Tous ces biens immeubles ont été acquis par flux financiers qui proviennent de sociétés off-shore, elles-mêmes alimentées par des détournements d’argent public ou d’argent de sociétés semi-publiques. » Et on a le sentiment que, dans cette histoire de robinets, la justice a beaucoup de mal à s’occuper du droit. Alors qu’elle a tant à faire avec le tordu.